L’obligation parentale d’entretien
Les parents ont le devoir de veiller à l’éducation, la formation, l’entretien, l’hébergement, la santé et le bien-être de leurs enfants en âge de formation, qu’ils soient mineurs ou majeurs. Cette responsabilité découle intrinsèquement du statut de parent. Dès l’établissement du lien de filiation, cette obligation s’impose au parent envers son enfant.
Cette obligation ne se limite pas à fournir à l’enfant ce dont il a besoin pour vivre, mais vise également à lui faire bénéficier du niveau de vie de son père ou de sa mère. Il s’agit de lui offrir un niveau d’éducation correspondant aux capacités économiques des parents.
Étant donné qu’il s’agit d’une obligation d’ordre public, les parties ne peuvent y déroger. Il est donc impossible de prévoir une exonération de l’obligation de contribuer à l’entretien, à l’éducation et à la formation de l’enfant par convention lors d’un divorce.
Facultés des parents
Pour évaluer les capacités financières des parties, le juge prendra en considération l’ensemble de leurs revenus. Ces revenus comprendront non seulement le salaire, les loyers, les actions et les obligations, mais aussi les revenus non déclarés, souvent appelés « revenus perçus en noir ». Le tribunal tiendra également compte des avantages perçus en nature. À titre d’exemple, une voiture de société est considérée comme un avantage en nature et sera prise en compte dans le calcul des revenus.
Nous soulignons qu’une diminution volontaire des revenus n’est généralement pas acceptée et ne sera donc pas prise en compte pour évaluer les capacités financières des parents. La jurisprudence exclut les situations où la réduction des revenus résulte de la volonté d’une partie de se rendre artificiellement plus pauvre afin de contribuer moins que ce que la réalité exigerait.
Dans le même ordre d’idées, tout avantage en nature fourni par l’une des parties sera également pris en compte pour l’évaluation de la part contributive.
Demande rétroactive
Les parents ont l’obligation légale de nourrir, entretenir et élever leurs enfants, indépendamment d’une action en justice. Cette obligation naît dès que les conditions sont réunies. Conformément à l’ancien Code civil, les arriérés de pensions alimentaires se prescrivent après cinq ans.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 30 septembre 2013, a statué qu’il n’existe pas de principe général interdisant de faire valoir un droit en raison d’une inaction prolongée. Un arrêt qui reprochait à une mère de ne pas avoir réclamé de pension alimentaire pendant cinq ans a donc été cassé. Une inaction prolongée ne constitue pas en soi une faute ou un abus de droit, sauf preuve d’une négligence fautive. Le tribunal de la famille de Namur, en 2017, a correctement appliqué ces principes en rejetant une demande de rétroactivité excessive, n’y voyant pas de faute dans le délai de deux mois pris par la mère pour réclamer sa contribution.
Dans une autre affaire en 2021, le tribunal a jugé qu’une mère avait abusé de son droit en ne réclamant une contribution alimentaire qu’après plusieurs années, alors qu’elle était en mesure de subvenir aux besoins de l’enfant. La rétroactivité a donc été limitée à deux ans.
Terme de l’obligation d’entretien
L’obligation parentale ne cesse pas à la majorité de l’enfant mais se poursuit jusqu’à la fin de sa formation, pourvu qu’elle suive un parcours normal et vise à l’autonomie économique de l’enfant. Les juridictions admettent généralement un « droit à l’erreur » pour l’enfant dans son parcours académique.
La jurisprudence montre qu’une formation adéquate doit permettre à l’enfant de s’insérer sur le marché du travail. Cependant, cette obligation ne s’éternise pas. Par exemple, après un diplôme initial, la poursuite d’études complémentaires reste couverte si elle est en lien avec la formation initiale et adaptée aux aptitudes de l’enfant.
Fin de l’obligation d’entretien
L’obligation parentale cesse lorsque l’enfant achève une formation adéquate. Une fois la formation terminée, si l’enfant n’est pas capable de subvenir à ses besoins, c’est l’obligation alimentaire des articles 205 et 207 de l’ancien Code civil qui s’applique, et non plus celle de l’article 203.
Cas particuliers
Dans certains cas, les parents restent responsables des frais liés à leurs enfants même si ceux-ci sont placés dans un service résidentiel pour jeunes. Le placement n’exonère pas les parents de leur obligation d’entretien. Par ailleurs, l’absence de contact ou de respect entre un enfant et un parent ne justifie pas la levée de l’obligation alimentaire.
L’exécution de l’obligation
Exécution en nature : Même si l’obligation alimentaire parentale se réalise en principe en nature (article 211 de l’ancien Code civil), le tribunal de Mons a refusé une telle exécution dans un cas où l’enfant majeur avait choisi de vivre principalement avec la mère, rendant inapplicable l’offre du père de s’acquitter de son obligation en nature.
Compte-enfant : L’article 203bis permet aux juges d’ordonner l’ouverture d’un compte dédié au paiement des contributions alimentaires. Dans une décision de février 2017, le tribunal de Bruxelles a instauré un tel compte pour éviter des conflits liés à certaines dépenses. Chaque parent contribue proportionnellement à ses capacités et gère les dépenses via ce compte, qui couvre des frais ordinaires et extraordinaires, comme les frais médicaux et scolaires. Une provision est versée par les parents, et tout excédent est transféré sur un compte épargne.
Titularité du droit d’action : L’enfant majeur peut engager une action en justice contre ses parents s’ils ne remplissent pas leur obligation alimentaire. Toutefois, l’action liée à la répartition des contributions entre parents est personnelle à l’un des parents et ne peut être intentée par l’enfant. Le tribunal de Namur a rappelé que l’action relative à la « contribution à la dette » concerne les parents, tandis que l’action liée à « l’obligation à la dette » peut être intentée par l’enfant majeur.
Paiement au créancier : Le créancier d’une contribution alimentaire est généralement l’un des parents. Les paiements faits directement à l’enfant majeur peuvent ne pas être libératoires pour le parent débiteur si ces sommes n’ont pas été officiellement reconnues. Néanmoins, dans certains cas, si ces paiements ont directement profité à l’enfant, ils peuvent être validés.
Prescription : Les créances alimentaires, y compris celles liées aux frais extraordinaires, se prescrivent par cinq ans selon l’article 2277 de l’ancien Code civil. La prescription commence à courir à chaque échéance de pension alimentaire, et non à partir de l’accord initial.